On me demande régulièrement quand est-ce que sera la fin de l’expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée en partant du principe qu’une expérimentation a une date de début et une date de fin avant une potentielle généralisation. A l’ère de l’immédiateté, du pouvoir algorithmique, du nouveau management public, expérimenter ce serait finalement tester et choisir dans une échelle de temps courte. Et si expérimenter était le commencement d'un changement profond des politiques publiques.
J’ai pour ma part une vision différente de ce que signifie « expérimenter ». A mesure que les espaces démocratiques se réduisent, expérimenter c’est donner un nouveau souffle à la vie de la cité. Expérimenter c’est ouvrir de nouveaux espaces pour agir dans la durée. Expérimenter c’est redonner du temps au temps. Expérimenter c’est associer, coopérer, apprendre et progresser. Expérimenter, c’est sortir de la routine pour explorer de nouveaux champs des possibles. Expérimenter ce n’est pas renoncer à la multitude, c’est au contraire viser l’exhaustivité.
Si une première loi a ouvert, en 2016, la possibilité d’expérimenter l’idée des Territoires zéro chômeur de longue durée dans 10 premiers territoires, il a fallu une seconde loi en 2020 pour étendre l’expérimentation à de nouveaux territoires. Fin 2024, nous serons sans doute à 90 territoires d’expérimentation en France. Il a fallu neuf années pour explorer de nouveaux territoires où il est désormais possible d’expérimenter en Europe, voire au-delà. Près d’une décennie plus tard, nous continuons d’apprendre et de tirer les leçons de l’expérience.
Comme l’écrivait Jean-Claude Petitfils dans « Les communautés utopistes au XIXème siècle », « Le chemin est au voyageur, ce que l’expérimentation est à l’utopiste ». Alors acceptons d’être sur ce chemin, sans savoir s’il la prochaine étape sera la dernière ou un nouveau maillon d'une longue chaîne.