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Face aux forces d'opposition à la loi que je défends, il est temps pour moi de reprendre ma plume. Lorsque j'ai commencé ma mission à la demande du Premier Ministre Manuel Valls suite au conflit des taxis en janvier 2016, je me rappelle cet échange vif sur Twitter avec le responsable d'Uber d'Europe car j'avais osé parlé de "paupérisation" des chauffeurs. J'avais osé affirmer que ma seule préoccupation était la protection des consommateurs et des chauffeurs face à certaines plateformes qui veulent imposer un état de fait à l'État de droit, une forme de Far West technologique. J'avais osé tout simplement mettre des mots sur des maux. 

Uber, avec ses moyens exorbitants, avait déjà commencé sa campagne dans les médias, dans les groupes parlementaires (même dans le mien) et dans l'appareil d'État. C'est vrai que leur principale préoccupation était de lever des milliards d'euros en Bourse plutôt que de se préoccuper de l'humain après les baisses brutales et non négociées des prix pour les chauffeurs. 

En fin de compte, pendant que les chauffeurs s'appauvrissent en travaillant, certaines plateformes s'enrichissent en dormant.

C'est cela aujourd'hui la réalité de "l'uberisation"qui est un mouvement visant à imposer des monopoles dans tous les secteurs et non pas à libérer les individus et les start-up. 

J'ai multiplié les réunions de concertation, les échanges avec tous les acteurs. J'ai rédigé une proposition de loi qui vise à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification de ce secteur du transport. 

Cette proposition de loi est soutenue par les chauffeurs Taxis, VTC et LOTI, n'en déplaise à certaines plateformes qui les ont utilisé comme de la chair à canon pour casser les prix du marché, pour écraser la concurrence, sans jamais se préoccuper de la casse sociale. J'ai vu sur le terrain des chauffeurs, de tous les statuts, en souffrance, ne parvenant pas à vivre décemment malgré le travail plus de 10 heures par jour et 7 jours / 7. J'ai vu des jeunes se retrouvant avec des crédits importants pour acheter leur voiture et ne parvenant pas à rembourser leur emprunt. J'ai vu des familles en difficulté. J'ai vu de la colère, de l'indignation et de la désespérance. 

Les chauffeurs ont été divisés pour mieux régner mais la prise de conscience sociale de leurs conditions de travail a effacé certaines frontières entre eux. À mesure que la prise de conscience sociale grandit, les frontières entre chauffeurs s'effacent et les rapports de force qui étaient invisibles sont enfin mis en lumière. À mesure que la prise de conscience sociale grandit, les forces d'expression s'organisent. À mesure que la prise de conscience sociale grandit, les syndicats commencent à porter la voix des travailleurs indépendants comme l'UNSA-VTC dans le VTC. À mesure que la prise de conscience grandit, les citoyens se réapproprient la politique pour changer l'ordre des choses. 

Oui il faut réguler sans empêcher l'innovation car il s'agit bien de permettre une concurrence saine entre tous les acteurs. Le numérique doit être au service de l'humain et non pas l'inverse. Il s'agit bien de permettre à un secteur de se développer avec des règles communes. Après le monopole G7, le duopole G7-Uber, que gagneraient les chauffeurs et les consommateurs à un monopole Uber ? Je suis contre les monopoles qui paupérisent les consommateurs et empêchent l'innovation. 

Oui il faut également aider les start-up et veiller à ce que la loi permette leur développement dans un écosystème où Uber veut imposer sa loi à tous. J'y serai vigilant et continuerai de travailler avec les acteurs qui veulent trouver des solutions durables. D'ailleurs il est assez amusant de voir que des plateformes comme Uber demandent à l'Etat la suppression de plateformes qui uberisent Uber, comme Heetch, mais jamais de régulation pour elle-même. 

Cette loi permet en particulier aux chauffeurs indépendants de vraiment être indépendants en ne se voyant pas imposer des clauses d'exclusivité par certaines plateformes qui les empêchent de travailler avec plusieurs plateformes. Il est d'ailleurs étonnant que ceux qui clament haut et fort leur volonté de libérer l'économie et les individus, sont les mêmes qui veulent réduire les indépendants à une relation déséquilibrée de dépendance totale et donc de subordination. Si certaines plateformes veulent décider de tout pour les indépendants, elles peuvent les salarier ! Oui les chauffeurs indépendants doivent pouvoir mettre en concurrence les plateformes entre elles, ne pas être déconnectés sans explication par une plateforme. Et j'invite d'ailleurs les chauffeurs à saisir collectivement le médiateur interentreprises, Pierre Pelouzet, concernant les conditions générales d'utilisation (CGU) de certaines plateformes qui témoignent d'un réel déséquilibre dans la relation commerciale. 

Oui la régulation de l'économie du Data (données) passe par le Data ! C'est comme si on essayait de réguler l'économie financière sans la finance ? Pourquoi ce qui est possible à New-York avec l'autorité de régulation "TCL", qui régule les transports par la remontée de données des plateformes, ne serait pas possible en France ? Et une fois la loi votée, il faudra encore se battre pour que les moyens soient mis en œuvre car le lobbying sait s'organiser dans l'ombre une fois que les lois sont votées pour mieux les réduire dans leur portée. En commission au Sénat mercredi dernier, l'article concernant la remontée de données a été supprimé par la majorité du Sénat. Les lobbys seraient-ils plus forts en France qu'aux Etats-Unis ? On peut effectivement s'interroger comme le montre la Lettre A cette semaine : https://www.lalettrea.fr/action-publique/2016/10/20/loi-vtc--comment-uber-assiege-le-senat,108186321-ARL En juillet, certains de mes collègues avaient été appelés par des responsables d'Uber pour les inviter à voter contre la loi que je défendais à l'Assemblée nationale, cela n'a pas fonctionné. 

Oui il faut responsabiliser tous les acteurs qui doivent être sur un même pied d'égalité. Quand on met en relation des consommateurs et des chauffeurs, on organise des transports et on doit donc vérifier un certain nombre d'éléments qui contribuent à la protection du consommateur. Là aussi certaines plateformes préféreraient aucune règle. Il faut rappeler aux amnésiques que s'il y a eu un conflit en janvier c'est bien parce que les plateformes ont contourné la loi en utilisant massivement des loti pour transporter une seule personne (le loti étant réservé pour le transport de groupe). Combien de jeunes ont été floués par des promesses mensongères à travers la loti ? Combien de situations humaines catastrophiques ? Il faut aussi rappeler aux amnésiques que s'il y a une loi c'est bien parce que les plateformes avaient refusées de transmettre de données à l'État suite à la lettre de mise en demeure qui leur avait été adressée.

Oui il faut simplifier ce secteur où trois statuts coexistent : taxis, vtc, loti. Nous sommes le seul pays au monde où quand nous sommes deux, on peut réserver un loti, un vtc, un taxi et quand on est tout seul on peut réserver un taxi ou un vtc mais pas un loti (c'est uniquement de transport de groupe contrairement à ce qu'on fait le plateformes en contournant la loi). Avec la loi, on sera dans une concurrence entre les taxis (qui ont le monopole de la maraude contrepartie de leur ADS) et les VTC après une période transitoire pour que les chauffeurs loti puissent continuer dans le VTC par reconnaissance de leur expérience professionnelle (12 mois d'activité). Il n'y aura donc pas de suppression d'emplois contrairement aux mensonges véhiculés par certaines plateformes avec le pouvoir de l'argent dans les médias. 

Ce sont des millions d'euros qui sont mobilisés aujourd'hui contre cette loi : achat de pages entières dans la presse en juillet, diffusion de messages aux consommateurs et aux chauffeurs, distribution de tracts à la sortie des métros dans Paris, cabinets de conseil parmi les plus chers du marché, ... Vous me direz donc que la loi a déjà créé des emplois par l'investissement dans le conseil, la communication et le lobbying ... 

Dans ce combat pour humaniser l'uberisation, pour permettre aux indépendants d'être véritablement indépendants des plateformes, je regrette le peu de prise de parole politique dans l'espace public. 

Alors j'appelle tous les chauffeurs, Taxis, VTC et Loti, à la conjonction des forces pour faire gagner la République face à la loi du plus fort. J'appelle à la plus grande mobilisation citoyenne pour mettre l'humain au coeur des choix. Le prochain rendez-vous est celui du Sénat le 2 novembre prochain pour le vote de la loi. 

Profitons du moment politique pour interpeller la classe politique dans son ensemble. Que chacun prenne position clairement.

D'ici là, il nous faut convaincre avec nos propres moyens, c'est à dire avec notre liberté d'expression qui elle n'a pas de prix ! Jean Jaurés disait que le courage c'est de comprendre le réel et d'aller à l'idéal. On ne gagne que les combats que l'on mène. Moi je mènerai le combat jusqu'au bout et vous ?

Tag(s) : #Conflit Taxis - VTC - Plateformes
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